“À l'ère de l'IA, on forme des stratèges, et des esprits critiques”

Céline Matuszak est maîtresse de conférences en information et communication à l’ICID, Institut de Communication, d’Information, de Documentation, de l’Université de Lille, et responsable pédagogique de la L1 Information-Communication.
Une formation historique de la région
Quelles sont les formations que propose l’ICID, dont le très connu département Infocom de l’Université de Lille, fait désormais partie ?
Céline Matuszak : À l’ICID, nous proposons deux grands types de formations : la licence, dont la première et la deuxième années ont été nouvellement créées en 2020, et des masters plus spécialisés en lien avec des secteurs clés du marché de la communication.
Et vers quels débouchés professionnels amène cette offre de formation ?
Céline Matuszak : Nos diplômés accèdent à des postes de chargés de communication généralistes, souvent orientés vers la gestion de projets en communication. Ils peuvent intégrer des grands groupes, des collectivités territoriales, des structures publiques, des start-up ou encore des PME. Environ 60% trouvent un emploi dans les six mois suivant leur diplôme, avec une répartition entre CDD et CDI.
Comment décririez-vous les compétences que vos étudiants développent tout au long de leur parcours universitaire ?
Céline Matuszak : L’ADN de nos formations repose sur le développement de l’esprit critique des enjeux stratégiques des organisations. Le travail autour de l’audit et l’évaluation des communications, avoir une compréhension des enjeux politiques, sociaux et
culturels de ces structures sont nos missions phares. On forme moins des techniciens, on a une volonté d’amener les étudiants vers le Bac+5 avec des compétences stratégiques et bien sûr une casquette de consultant, d’audit de la com’, de “stratège de la communication”.
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On forme moins des techniciens que des généralistes "stratèges de la communication"
Avec l’IA, naviguer entre discours enchanteurs et alarmistes
En quoi l’IA questionne-t-elle les matières enseignées, les méthodes pédagogiques et les métiers de demain ?
Céline Matuszak : Il y a beaucoup de questionnements sur les modalités, notamment par l’usage massif, voire quotidien, de la part des étudiants. Cela change surtout de pouvoir accompagner les étudiants dans la compréhension globale du système de l’IA, des innovations et dépasser les discours enchanteurs et des discours alarmistes : il faut naviguer entre ces deux orientations. Les étudiants sont souvent un peu perdus. Donc accompagner par des discours et une compréhension de l’environnement technique et social mais aussi les amener à se questionner sur cet usage.
Comment associer enseignement et préparation des étudiants à cette évolution ?
Céline Matuszak : Dans mon cours lié au travail de l’écrit, je mets en place une séance pédagogique avec plusieurs phases. Les étudiants écrivent d’abord seuls, puis utilisent l’IA et observent ce qui est complété par l’outil, avant de réfléchir ensemble à l’impact de l’IA sur les écrits. Cela les aide à comprendre ce qu’elle produit et à cultiver leur esprit critique. Le danger principal réside dans le fait de tomber dans la facilité
sans développer ni faire appel à ce même esprit critique. Il faut rester vigilant et ne pas se laisser porter par l’IA sans remettre en question ce qu’elle produit.
Avec l'AI, il faut rester vigilant et développer son esprit critique
Comment voyez-vous évoluer le rôle des communicants face aux mutations technologiques et sociétales ?
Céline Matuszak : Le communicant reste au cœur de ces transformations. Il doit s’adapter et comprendre les enjeux stratégiques des organisations, tout en apportant une dimension éthique et pédagogique. L’aspect de la responsabilité sociale des entreprises (RSE) devient d’ailleurs central dans ce contexte.
Le communicant est au cœur des transformations : il doit s'adapter, comprendre les enjeux, et apporter une dimension éthique